lundi 5 septembre 2016

Mercredi 7 septembre - Géographie - Clefs de lecture d'un monde complexe


Séance 2 - Une lecture géopolitique du monde actuel : un monde complexe, conflictuel, multipolaire dont la gouvernance est difficile, celui du "nouveau désordre mondial"

Cours magistral:Qu'est ce que la géopolitique? Quelle lecture du monde permet-elle ?
 
"La géopolitique est l'étude des rivalités de pouvoir(s) et/ou d'influence(s) sur un territoire donné."
Yves Lacoste, fondateur d’Hérodote, géographe et celui qui a relancé l’expression géopolitique et son étude dans les années 1980.


Etude des rivalités, relations et rapports (de force notamment) entre acteurs à une échelle donnée.


"La géopolitique a pour objet l'étude des interactions entre l'espace géographique et les rivalités de pouvoirs qui en découlent. (…) elle est le terrain de manœuvre de la puissance locale, régionale ou mondiale. (…) "
Alexandre Defay, La géopolitique, PUF, Que sais je ?


"La géopolitique est l’étude des enjeux territoriaux mobilisant différents pouvoirs rivaux (étatiques, mais aussi intra et interétatiques). C’est un savoir (une science ?) de la conflictualité, celle-ci résultant de l’expression plus ou moins violente de représentations contradictoires d’un territoire. C’est un savoir pratique et opératoire qui a pour fondement une méthode d’analyse scientifique reposant sur la prise en compte des multiples échelles de temps et d’espace."


Emmanuel Fabre, « De la géopolitique. Le point de vue des dictionnaires de géopolitique », Cybergeo : European Journal of Geography, ( http://cybergeo.revues.org/3901 )


Il existe de nombreuses définitions de la géopolitique plus ou moins proches l’une de l’autre.


Selon Fernand Braudel, la géopolitique est l’étude de la politique dans l’espace et le temps. Elle répond à deux interrogations essentielles : Qu'est‐ce que la puissance ? Où et comment se localise‐t‐elle ?


Selon P.M. Gallois, « la géopolitique est l’étude des relations qui existent entre la conduite d’une politique de puissance et le cadre géographique dans lequel elle s’exerce » (Gallois, 1990).


P. Moreau Defarges souligne : « qu’il n’y a pas de démarche géopolitique sans, au départ, une analyse de la terre, notre planète, comme un vaste et unique champ de manœuvre ».


La géopolitique est selon Yves Lacoste « une nouvelle manière de voir le monde qui dépasse la simple lecture des données économiques et propose d'autres mobiles que la recherche de profits ou la conquête de terres fertiles ». Il présente la géopolitique comme « un savoir penser l'espace terrestre et les luttes qui s'y déroulent ».


Pascal Lorot la définit comme « une méthode particulière qui repère, identifie et analyse les phénomènes conflictuels, les stratégies offensives ou défensives centrées sur la possession d'un territoire, sous le triple regard des influences du milieu géographique, pris au sens physique et humain, des arguments politiques des protagonistes du conflit et des tendances lourdes et continuité de l'histoire ».


Aymeric Chauprade, géopoliticien controversé et militant d'extrême droite, condense la définition en ces termes: « la géopolitique est l’étude de la volonté de puissance appliquée aux situations de la géographie physique et humaine ».


Selon Michel Foucher, géographe et cartographe spécialiste de la frontière,  «la géopolitique est une méthode globale d’analyse géographique de situations sociopolitiques concrètes envisagées en tant qu’elles sont localisées et des représentations habituelles qui les décrivent ».


Pour P. Claval, « la géopolitique prend en compte l’ensemble des préoccupations des acteurs en présence sur la scène internationale (Hommes d’Etat, diplomates, armée, ONG, opinion publique etc.) et s’interroge sur les aspects spatiaux au sein des plans élaborés par ces divers acteurs : elle s’interroge sur les calculs des uns et des autres afin de comprendre ce qui les pousse à agir ».


De toutes ces définitions, il est possible de dégager un point commun: «toute géopolitique est une réflexion sur la puissance ». 

La puissance est le produit de la force des acteurs et de leurs situations géographiques. En d’autres termes, « la puissance d’un État ne tient pas seulement à la solidité de son potentiel militaire, humain, économique etc. mais aussi à sa situation géographique ».


La géopolitique vise à analyser le lien étroit qui unit le politique et la géographie : la politique d’un Etat est fortement conditionnée par de multiples constantes géographiques.


Cours en autonomie: 


Les élèves en groupe répondent aux questions suivantes: 
- Comment s'organise le monde aujourd'hui du point de vue géopolitique ? 
- Dans quelle mesure le monde d'aujourd'hui est-il un monde un monde complexe, conflictuel, multipolaire dont la gouvernance est difficile, celui du "nouveau désordre mondial ?

Présenter le document 1 page 26 de manière conventionnelle

Reprise en cours dialogué
Analyse du document 1 page 26

- Découpage du monde en Etats (pavage étatique)
- Le monde actuel est marqué par une conflictualité évidente, de différentes natures qui concernent des Etats par ailleurs de plus en plus nombreux depuis 1945.
- Le monde est de plus en plus complexe (nombre d'acteurs étatiques passant d'une cinquantaine au milieu du XXème siècle à 193 aujourd'hui Etats reconnus par l'ONU; avec certains Etats ou territoires qui ne sont pas reconnus ou qui le veulent - Palestine...).
http://www.un.org/fr/sections/member-states/growth-united-nations-membership-1945-present/index.html

- L'entité géopolitique reste et demeure l'Etat qui matérialise son autorité par la frontière.

- On n'a jamais autant de frontières depuis 1945, la frontière étant une notion complexe et de différente nature (terrestre, maritime avec ZEE).  

- La frontière et sa maîtrise sont des enjeux essentiels.

- Le monde est traversé par des conflictualités nombreuses mais qui se concentrent pour la plupart dans une zone appelée "l'arc des crises" qui va de l'Afrique à l'Asie centrale en passant par le Proche et Moyen Orient. 

Les formes de la guerre changent tout comme la nature des conflits :
-  la guerre interétatique ne domine plus. Cependant tous les continents sont touchés par des conflictualités de différentes natures (conflits internes - guerres civiles, guérilla, luttes indépendantistes, sécessionnistes, autonomistes -; conflits interétatiques)  

- les conflits ne sont plus aussi violents, meurtriers mais ils sont de plus en plus complexes; leurs conséquences le sont tout autant. Les victimes ne sont plus militaires mais majoritairement civile (inversion des courbes depuis 1945).

- les acteurs de la guerre ne sont plus les mêmes: leur nature varie et modifie la prépondérance de l'Etat dans l'affaire conflictuelle traditionnelle.

-  Les conflits interétatiques ont été dominants dans l'histoire, aujourd'hui leur nombre ne cesse de décroître. La démocratie n'a jamais aussi présente dans l'histoire du monde et le nombre de conflits entre Etats n'a jamais été aussi faible. Le nombre de conflits de haute intensité n'a jamais été aussi faible mais cela s'explique par le fait que la conflictualité et ses formes ont changé.

- Le monde est complexe traversé par des conflictualités nouvelles, un "nouvel art de la guerre" (Gérard Chaliand) et des "guerres asymétriques" qu'on peut appeler des "guerres bâtardes".


Constat : Nous sommes face à un monde complexe, de plus en plus conflictuel avec des acteurs différents mais dont l'affrontement ne débouche pas forcément sur des guerres classiques (terrorisme, guerre civile, guérilla, mouvement indépendantistes ou sécessionnistes...). 

Quels sont les acteurs géopolitiques dominants ?
- Les Etats demeurent les acteurs géopolitiques dominants et notamment les plus importants d'entre eux, ceux qui figurent au Conseil de sécurité de l'ONU: EU, Russie, Chine, France, RU; ils possèdent le droit de veto et sont des puissances militaires possédant notamment l'arme nucléaire et la capacité de projeter leurs forces militaires; 

- D'autres acteurs apparaissent et contrebalancent leur influence :

- Les organisations et institutions internationales comme l'ONU, le G8, le G20, l'OEA=Organisation des Etats Américains, OUA=Organisation de l'Unité Africaine...; les ONG; les mafias et organisations criminelles et terroristes; l'opinion internationale et les personnalités mondiales; les FTN (firmes transnationales); les organisations régionales (UE, Mercosur, ASEAN...), les think tanks (organe de réflexion géopolitique).

Aujourd'hui, un seul Etat comme les E-Unis ne peut plus influer sur le sort et le devenir des relations internationales et du monde, ciomme ce fut le cas après la chute de l'URSS. On peut donc affirmer au regard de la présence d'autres acteurs et de la relativité de l'influence des grandes puissances, que le monde est devenu multipolaire (avec l'émergence de nouvelles puissances) voire apolaire pour Bertrand Badié  (si l'on considère la montée de nouveaux acteurs autres qu'étatiques et l'incapacité d'une seule puissance ou de plusieurs à réguler seules le monde contemporain).

- On peut donc considérer le monde comme complexe, conflictuel, multipolaire et de plus en plus instable (monde apolaire) cela induit une gouvernance de plus en plus difficile, à toutes les échelles. 

Lien à explorer: http://www.ladocumentationfrancaise.fr/dossiers/d000547-les-acteurs-des-relations-internationales




Précision : Aujourd'hui, on ne parle plus d'Etats faillis ou défaillants mais d'Etats fragiles.
 

Définitions à connaître et bibliographie complémentaire


Frontière: Limite du territoire d'un État et de l'exercice de la compétence territoriale.
Définition page 224

Livre pour aller plus loin

L'obsession des frontières, Michel Foucher, Perrin, Tempus

Lien pour aller plus loin: http://geoconfluences.ens-lyon.fr/geoconfluences/doc/typespace/frontier/FrontScient.htm 


Nation: ensemble de personnes qui se reconnaissent une histoire, une culture et une langue communes et qui veulent vivre ensemble


Etat: territoire sur lequel une autorité et ses représentants exerce un contrôle et qui correspond au territoire d’une nation; on parlera d’Etat-nation.

Puissance: Capacité d'un Etat à influencer à son profit l'action d'autres acteurs

Livre pour aller plus loin:

La puissance au XXIème siècle, P.Bühler, CNRS éditions
Vers un nouvel ordre mondial, Gérard Chaliand, Points Seuil

Gouvernance: art de gouverner, ensemble des règles, des acteurs et actions liés à la résolution d'une question commune entraînant l'exercice d'une autorité.


Conflictualité :
  • Caractère d'une situation conflictuelle, venant du latin conflictus (« choc »)
  • Ensemble des conflits de toutes natures et quels que soient leur intensité (haute ou basse
Conflit: Il vient du latin confligere (con- : ensemble ; fligere : heurter, frapper) ou conflictus (choc, heurt, lutte, attaque). Au sens le plus englobant, un conflit est une opposition entre deux ou plusieurs acteurs. Il éclate lorsqu’un acteur, individuel ou collectif, a un comportement qui porte atteinte à l’intérêt d’autres acteurs. Il implique donc l’existence d’un antagonisme qui peut prendre diverses formes : un rapport entre des forces opposées, une rivalité ou une inimitié, une guerre, etc. Il existe ainsi une échelle de la conflictualité qui va du désaccord à la tension et à la violence, en passant par un nombre plus ou moins grande de degrés intermédiaires.
Livres pour aller plus loin:

La puissance miliaire, Questions internationales, Juillet-Août 2015
Les guerres bâtardes, Comment l'Occident perd les guerres au XXIème siècle, Arnaud de Lagrange, Jean-Marc Balencie, Tempus, Perrin
Le nouvel art de la guerre, Gérard Chaliand, L'Archipel

Travail pour vendredi 9 septembre
- Produire en vous aidant du document page 27, un schéma qui présente la complexité géopolitique du monde contemporain en prenant en compte :
- sa gouverance
- ses crises
- les acteurs principaux

- Présenter de manière conventionnelle et rédigée, les documents 1 à 4 pages 22-23 et 1 à 4 pagesq 24-25


Travail pour lundi 12 septembre

Questionnaire noté en ligne à remplir
https://goo.gl/forms/y9Ly8s4pGOPr8sqI3